Concept & direction: Thomas Hauert
Choreography, dance, singing, song texts & composition: Thomas Hauert, Martin Kilvady, Sara Ludi, Chrysa Parkinson, Samantha van Wissen, Mat Voorter.
Music composition & piano: Alejandro Petrasso
Text: Oscar van den Boogaard
Voice over: Stuart McQuarrie
Music composition: Bart Aga
Soundtrack: Aliocha Van der Avoort
Lights & stage design: Jan Van Gijsel
Costumes: http://www.own.be / Thierry Rondenet & Hervé Yvrenogeau
Technical Director: Jan Van Gijsel
Sound Technician: Peter Van Hoesen
Production: ZOO
Co-production: Kaaitheater /KunstenfestivaldesArts (Brussels), Théâtre de la Ville / Festival d\'Automne à Paris (Paris), Tanz Quartier Wien (Vienna), Charleroi Danses Centre Chorégraphique de la Communauté Française (Charleroi), Mercat de les Flors (Barcelona).
With the support of the Flemish Minister for Culture, Youth, Sport and Brussels Affairs, the Vlaamse Gemeenschapscommissie and Pro Helvetia Arts Council for Switserland, Kanton Solothurn, SACD (1000 hours to dance)
Thanks to: Nadine, Rosas, Louise Donald, Rahel Stude, Mark Lorimer, Michel Debrulle, Frank Vandezande, Jan Herinckx, Inge Ceustermans.
Musical.
"Walking Oscar": een alien-musical.
"Walking Oscar" is een uitzinnige musical op tekst van Oscar van den Boogaard.
"Walking Oscar"': a musical for aliens
"Walking Oscar": a frenzied musical with texts by Oscar van den Boogaard
Oscar van den Boogaard has written some kind of fragmented diary of memories. His stories are about ordinary things: a trip to Knokke for pheasant with chicory; lovers and faithful followers; city dwellers and parents. His observations are detailed and critical. He makes sums of possible lovers and observes urban life as a decor for his concoctions, but above all, he tells about his dolls, those manipulable, smooth, perfect vehicles of his imagination.
His dolls seem to serve as a model for real life. They live a life that humans could only dream of. Maybe we live our lives just like a fantasy, a constant imitation of their doll’s lives.
Thomas Hauert’s company ZOO plays with those text fragments in the performance Walking Oscar. The writer’s reveries are embodied in quite a literal way: the dancers are sitting behind a transparent screen, onto which the text is projected. Their bodies can be seen through the words and only take shape by the associations that arise between them and the stories.
They personify typical characters from musicals, such as the sailor, the cowboy or the diva. But their bodies remain isolated. The contact between the characters is minimal and seems inspired by a compulsory scenario: dolls playing they are human beings, a couple on a couch, a dog on a doormat. They search for a form for emotions that they have only read about. With thin voices they sing about love and devotion. But on the stage, they do not get much further than some uncomfortable manipulations that they impose themselves. The voices are either too aggressive or too shrill. The music is just too little concrete to become a recognisable tune. The text is studied by the dancers as a language course, as if they were totally unfamiliar with speech.
The performance looks like an alien version of a musical. The choreography is alienating and influences the interpretation of the (at first sight) effortlessly understandable text by Van den Boogaard.
Walking Oscar is a bizarre show. The excitement that is normally associated with musicals, is interrupted and jerkily sent into the audience. It is music theatre like you have never seen before, a performance that makes you peek in despair at your neighbour. But at the same time the combined play of the projected text and the isolated images on the stage creates an intriguing spectrum of possibilities.
Walking Oscar is a doll’s house in which you can make up your own scenario. It is a playground for your imagination and memory. It is a performance like an invitation towards the spectator.
"Walking Oscar", by Thomas Hauert and his company ZOO. Seen at the KunstenfestivaldesArts in Brussels on May 6. Until May 10 at the Kaaitheater. Tickets: 070-22.21.99.
THOMAS HAUERT et le don du vertige
Peu connu du grand public mais reconnu par la profession, le chorégraphe suisse, installé à Bruxelles depuis 1991, se place en champion du « remue-méninges », au service d'une danse qui repousse les limites du corps.
Il est suisse, vit à Bruxelles depuis 1991. Il danse et chante, fait parfois les deux en même temps. En anglais, mais aussi en français, avec le rude accent du canton allemand de Soleure, près de Bern, où il est né dans un petit village il y a trente-neuf ans. Sa compagnie, créée en 1997, possède le nom inoubliable de ZOO, immédiatement associé à son premier spectacle, tout aussi inoubliable, intitulé Cows in Space. Soit, à partir de l'image des vaches broutant dans un pré qu'un voyageur regarde à travers les vitres d'un train, une pièce chorégraphique abstraite dans laquelle cinq danseurs sont lancés dans des circulations enchevêtrées. Les lignes se coupent et recoupent à des vitesses variables pour composer un saisissant paysage dont l'étrangeté réside dans l'incertitude qui plane sur le fonctionnement des corps. La partition gestuelle est-elle interprétée à l'envers comme on rembobine un film? Qui sait. Peu connu du grand public, mais lesté de quelques prix internationaux (dont le Prix d'auteur aux Rencontres chorégraphiques de Seine-Saint-Denis pour Cows in Space en 1998), Thomas Hauert possède le don du vertige, lent mais profond, avec des spectacles résolument sophistiqués. Ce champion du remue-méninges met au point des scénarios aux rouages nombreux et tordus, ce qui explique un résultat scénique formidablement touffu. Dans Common Senses (2003), une part du processus de travail résidait dans l'apprentissage de mélodies d'Anton Bruckner par les dix danseurs. Improvisée, la pièce se donnait pourtant en silence pendant que les interprètes intériorisaient les chants pour en trouver la pulsation juste, la respiration commune rythmée par la musique. Thomas Hauert reste sibyllin à propos de la complexité qui nourrit ses pièces, de son goût pour les concepts. Multiplier les couches d'idées et d'images dans un spectacle lui semble la moindre des élégances vis-à-vis de lui-même et du spectateur. Il reconnait cependant : « Ecouter une voix, prononcer des mots et comprendre ou non la voix (ou écouter de la musique, une chanson, ou regarder jouer des acteurs, etc.) n'est qu'une partie de l'expérience, elle comporte aussi un aspect mental : tout ce qu'elle évoque pour vous. Si vous avez deux expériences ou plus simultanément, les associations se brouillent. Cela aussi, c'est comprendre. »
Un événement n'arrive jamais seul chez Thomas Hauert. Son invention proliférante fait plus que muscler l'imagination : elle met au jour un nouveau vocabulaire gestuel, bouscule la syntaxe, peaufine des règles de grammaire inédites pour aboutir à une langue singulièrement vive. « Depuis les débuts de la compagnie, je travaille à repousser les limites du corps, à forcer les évidences anatomiques pour élargir le spectre du mouvement. Tout est possible. Il suffit de vouloir faire cette recherche et de croire qu'on est loin d'avoir exploré toutes les capacités du corps. » D'où parfois la sensation de contempler une danse contrariée, de guingois, concassée même. Volontairement mal dégrossi ou interprété à l'arraché, le geste de Thomas Hauert ne cède jamais à la tentation du lisse et du beau.
Pour sa nouvelle pièce Walking Oscar, il s'est adossé à l'œuvre de l'écrivain hollandais Oscar Van den Boogard qui lui a donné des textes composant une sorte d'autobiographie éclatée. Le chorégraphe en a conservé des fragments, série d'anecdotes tantôt banales, tantôt insolites, dressant le portrait d'un homme insaisissable. A partir de ce canevas, chacun des six danseurs a repris à son compte un objet ou un mot, écrit des chansons et tramé l'épaisseur d'une vie au gré d'associations d'idées et de thèmes comme l'innocence et la responsabilité, l'identité et l'adaptation, la volonté et la manipulation. « Oscar nous a donné carte blanche et nous sommes partis en balade avec son alter ego. Nous le montrons, nous le chantons, nous le rhabillons, nous le confirmons, nous le contredisons, nous l'interprétons, nous l'incarnons, nous le critiquons, nous le comparons, nous le comprenons mal, nous l'obscurcissons et nous sommes sa sœur. Il ne s'agit pas d'évoquer l’écrivain, même si finalement le langage, la question des mots, de l'écriture, de la perception sont au cœur de la pièce. » Etiquetée « comédie musicale », Walking Oscar rassemble les morceaux d'un portrait masculin sans cesse mouvant où chaque nouvelle information sur le personnage épaissit son mystère plutôt que de l'éclairer. Quelques indices se glissent néanmoins entre les multiples couches sans cesse ajoutées par le chorégraphe. On apprend que Thomas Hauert, qui démarra la danse très tardivement, eut son premier choc spectaculaire à 5 ans avec Holiday on Ice, que ses parents l'avaient emmené voir à Bern. Après cette vision enchanteresse, Thomas Hauert passait son temps à danser à la maison. Ce n'est qu'à 22 ans, après des études d'instituteur, qu'il choisit la danse en partant faire son apprentissage dans une école de Rotterdam. On sait aussi qu'enfant Oscar avait des difficultés pour colorier le dessin d'un être humain et avait beau mélanger les teintes, il ne parvenait pas à trouver la juste couleur de la peau. Il la laissait donc en blanc.
Rosita Boisseau
"Souviens-toi de m'oublier", chantaient naguère Serge Gainsbourg et Catherine Deneuve. Cette chanson d'adieu n'apparaît pas au répertoire des six danseurs-chanteurs de Walking Oscar, à Genève ce week-end encore. Elle aurait pu, tant ce spectacle nappé de mélancolie piste l'amour quand il s'évanouit, tourne autour du gouffre qu'il laisse, rameute les ombres. Signée Thomas Hauert – chorégraphe suisse établi à Bruxelles –, cette comédie musicale hallucinée console de nos solitudes, avec cet air de dérision qui est parfois un appel à l'insurrection. Aux armes, la dépression ne passera pas!
Walking Oscar possède cette grâce: il fait de nous des somnanbules. Cela tient d'abord au texte qui sous-tend la déambulation: Walking Oscar est une enquête sur soi menée par le Néerlandais Oscar Van den Boogaard – auteur de La Mort de l'amour. C'est sa quête qui s'imprime pendant toute la représentation sur l'écran transparent qui nous sépare des interprètes. C'est sa méditation qu'une voix relate en anglais. Nous voici alors entraînés dans les ruelles de son enfance, dans les alcôves de ses maîtresses, dans le tombeau d'une adorée.
Cela, c'est ce que la voix dit – ce que le somnanbule de service a cru entendre. Sur scène, un pianiste imprime son velouté élégiaque. Une Miss Monde chante comme à Broadway. Miel pour soigner l'amertume. Et puis soudain, c'est à se tordre. Un homme, une femme cherchent les gestes de l'amour, manipulés, comme les marionnettes géantes du bunraku japonais, par des ombres. Pendant cette danse désarticulée, on entend une femme répéter les mots d'un professeur d'anglais. Jeu de tâtonnements. Préliminaires tendres à l'aveugle. Ces amants s'oublieront. C'est dans le texte de Boogaard. Serge Gainsbourg chantait: "L'amnésie a le pouvoir/D'la magie noire."
Alexandre Demidoff